mardi 23 avril 2024

English Teacher - This Could Be Texas [Island Records]

Est-ce la hype anglaise qui m'a fait venir à reculons à ce 'This Could Be Texas', premier album de English Teacher ? Sans doute. Il faut dire que depuis le temps qu'on la suit, on s'est habitué à ses lubies et à ses emballements aussi éruptifs que sans lendemain. Pourtant, le quatuor de Leeds avait plus qu'éveillé ma curiosité l'an dernier avec Nearly Daffodils, épatant single à l'immédiateté dingue. J'aurais dû être le premier à me jeter sur ce disque. Mais trop de louanges, ça questionne, forcément. Alors, même si la première écoute de 'This Could Be Texas' a été plutôt convaincante, ça ne m'a pas bouleversé et j'ai remisé l'album de côté, convaincu qu'on était sur quelque-chose de finalement quelconque de la part groupe aussitôt apparu et qu'il allait aussitôt être oublié.

Quel sot je fus. Car j'ai évidemment donné une autre chance à ce premier album des English Teacher. Déjà parce que la première écoute avait été au débotté (c'est le souci quand on fait autre chose pendant ce temps là et qu'on est à moitié à son affaire). Et puis toutes ces dithyrambes, ça interpelle, ça interroge. C'est perturbant. On a envie d'être sûr de son coup. Mais plus d'hésitation : sachez-le, sûr, je le suis désormais. 'This Could Be Texas' n'est pas un bon premier album. 'This Could Be Texas' n'est pas un très bon premier album. Non, 'This Could Be Texas' est un excellent premier album, du genre qui a une autre période aurait fait date, marqué son temps et son époque. Mais quel disque en 2024 fait date, noyé qu'il est dans un nombre toujours plus grands de sorties hebdomadaires - quand elles ne sont pas quotidiennes ?

Alors plutôt que de vouloir le faire entrer de force dans un panthéon qui n'existe pas, félicitons nous de cette œuvre remarquable des English Teacher. Treize chansons pour cinquante minutes, au fil d'Ariane post-punk mais qui n'en fait pas pour autant un disque post-punk. Car il y a tellement plus ici : de l'indie-rock (I'm Not Crying You're Crying) aux relents slowcore (Albatross, parfaite entrée en matière), de la pop belle à tomber (This Could Be Texas) ou plus synthétique (Sideboob) de balades majestueuses (Mastermind Specialism, You Blister My Paint ou Albert Road, chanson de conclusion à la fin brutale, comme pour rappeler qu'ils viennent du post-punk), de points d'exclamations presque free-jazz (Broken Biscuits), et même de simili R’n’B (sublime The Best Tears of Your Life).

Auréolé d'une production remarquable qui ne subit pas les chansons mais sait s'adapter à elles, d'un mix méticuleux, de basses terriblement soignées, de guitares qui jouent le feu et la glace, d'une rythmique impeccable (élément moteur de l'album), de textes pas anodins et bien dans leur époque, le tout soutenu par la voix toujours plus surprenante et belle de Lily Fontaine qui alterne avec subtilité spoken word et chant, 'This Could Be Texas' est un disque immense, aux compositions, à la construction et à l'unité éclatantes. Un album, un vrai, pensé comme tel, écrit comme tel, assemblé comme tel. La marque des très grands. Ce que sont les English Teacher, assurément. La perfide Albion ne s'est pas trompée. (Sortie : 12 avril 2024)

Plus :
'This Could Be Texas' de English Teacher est à l'écoute sur bandcamp
'This Could Be Texas' de English Teacher est à l'achat sur bandcamp
'This Could Be Texas' de English Teacher est disponible à l'achat et à l'écoute un peu partout


Trois chansons de 'This Could Be Texas' de English Teacher en écoute aujourd'hui. I'm Not Crying You're Crying pour ouvrir le bal, entre post-punk et indie-rock (en écoute également dans les playlists Spotify, Deezer, YouTube et dans la colonne de gauche du blog). Puis la chanson de conclusion Albert Road, belle et ample comme tout. Et enfin le superbe The Best Tears of Your Life, R’n’B en diable et qui a tout d'un tube :

Beaucoup de singles ont été tirés de 'This Could Be Texas' de English Teacher. Et donc beaucoup de clips. Comme on ne va pas tous les publier, optons pour ceux de The Best Tears of Your Life et Albert Road :

lundi 22 avril 2024

[Track of The Day] Outer World - Forms of Knowing

Beaucoup de belles choses dans ce 'Who Does the Music Love?', premier album des américains de Outer World, le nouveau projet de deux anciens de Positive No, Tracy Wilson et Kenneth Close. Un disque qui a plus des allures de long Ep que d'un véritable album (sept morceaux pour tout juste vingt-trois minutes) mais qui ne manque pas de sacrées chansons, le plus souvent garage-pop psychédéliques, lorgnant parfois vers des sonorités sixties, le tout auréolé d'une production post-punk plutôt parfaite.

Un disque sur lequel plane l'ombre de The Sweeping Promises (c'est le premier nom qui m'est venu à l'écoute de 'Who Does the Music Love?'), de l'ambiance générale en passant par des petits détails (l'intro de Have qui ne peut pas être autre chose qu'un gros clin d’œil à Cross Me Out). Et le fait que les premières démos d'Outer World aient été enregistrées dans leur studio ou que Lira Mondal soit de la partie sur la chanson d'ouverture The Drum the Beat n'y est évidemment pas pour rien. En quelque  sorte donc, Outer World est le petit frère psyché de The Sweeping Promises. Espérons pour lui qu'il suive la même trajectoire.

Album : Who Does the Music Love?
Année : 2024
Label : Happy Happy Birthday To Me Records

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En plus des playlists Spotify, Deezer et YouTube, Forms of Knowing de Outer World est également en écoute ci-dessous :

Autre chanson très réussie de Outer World, voilà The Drum the Beat qui ouvre 'Who Does the Music Love?' :

Le clip de The Drum the Beat de Outer World :

vendredi 19 avril 2024

[Track of The Day] Lionlimb - Dream of You (feat. Angel Olsen)

Quoiqu'en dise son titre, Dream of You n'est pas une énième chanson d'amour. Enfin si. Mais pas comme on l'entend habituellement. Car celle-ci est dédiée à un chien, celui de Stewart Bronaugh, un des deux membres des américains de Lionlimb. Décédé il y a deux ans, Limbo (c'est son nom, qu'il donne à l'album d'ailleurs) avait une telle place dans la vie de Bronaugh qu'il a longtemps habité les rêves de son propriétaire - des moments, comme il le raconte lui-même, joyeux et quasi réels.

Si les paroles expriment très bien cette sensation (« Darlin', until then I'm gone to sleep again, pleadin' and hopin' for each new day to end, 'Cause all that I can do 'til it comes true Is dream of you »), la joie est plutôt absente de Dream of You. Mais pas la beauté. Chanson de blues rêveur à l'ambiance presque trip-hop, lancinante et langoureuse, elle est habillée par la voix de la formidable Angel Olsen, empreinte de mélancolie, dans lequel on entend quelques soupçons de Jennifer Charles d'Elysian Fields.

Album : Limbo
Année : 2024
Label : Bayonet Records

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En plus des playlists Spotify, Deezer et YouTube, Dream of You de Lionlimb et Angel Olsen est également en écoute ci-dessous :

Le clip de Dream of You de Lionlimb et Angel Olsen :

mercredi 17 avril 2024

[Track of The Day] RJD2 - Through It All (feat. Jamie Lidell)

Il était question d'ambiance soulful hier avec la magnifique December In Her Eyes de Pernice Brothers ? Continuons donc sur la lancée avec aujourd'hui en écoute Through It All, morceau qu'on n'avait pas vu venir de la part de deux artistes plus si jeunes, à la longue carrière mais dont la gloire est désormais derrière eux.

Les deux en question sont RJD2 et Jamie Lidell. L'un américain, auteur d'un album mémorable en 2002 'Deadringer' (et d'un titre Ghostwriter d'une classe toujours aussi folle plus de vingt ans après, même après avoir été pendant longtemps le générique d'une émission radiophonique humoristico-sportive quotidienne ou d'avoir enchainé les synchro), homme charmant, tiré à quatre épingles au début de sa carrière et qui un jour tomba sous le charme d'Arnaud Fleurent-Didier par l'entremise de votre serviteur. Et de l'autre un anglais, synth-funkeur du futur chez Warp et qui aurait mérité sans doute un peu plus de succès à l'époque.

Sauf que les années 2000 c'était il y a vingt ans. Et que depuis, nos deux amis sont rentrés dans le rang. Et que je les ai totalement perdus de vue. Si RJD2 continue de publier de nouveaux albums tous les deux ou trois ans, c'est dans une indifférence plutôt générale. Quant à Jamie Lidell, il semble s'être rangé des voitures. 

Les voir réunis pour le premier single du prochain disque de RJD2 'Visions Out Of Limelight' est donc une surprise. Et elle a une belle gueule la surprise, car Through It All est une sacrée chanson : plus de cinq minutes d'un r&b smooth et aérien, porté par le chant soul au possible de Jamie Lidell - dont quelques fulgurances évoquent Stevie Wonder - et par une production légère mais travaillée de RJD2, à la rythmique juste et délicate, et aux bruits de bouche inspirés (c'est lui qui le dit) par quelques vieilles et grandes prod de Timbaland (avant qu'il aille fricoter avec M. Pokora en somme). 

Bref, Through It All un titre aussi incroyable qu'inattendu, venu en quelque sorte du passé, mais pas passéiste pour autant. Une chanson qui prouve une fois de plus que ce n'est pas forcément mieux avant : c'est surtout bon maintenant.

Album : Visions Out Of Limelight
Année : 2024
Label : RJ’s Electrical Connections

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En plus des playlists Spotify, Deezer et YouTube, Through It All de RJD2 et Jamie Lidell est également en écoute ci-dessous :

Le clip de Through It All de RJD2 et Jamie Lidell, premier extrait de 'Visions Out Of Limelight' :

mardi 16 avril 2024

[Track of The Day] Pernice Brothers - December In Her Eyes

December In Her Eyes est une chanson pivot. Celle de 'Who Will You Believe', nouvel album de Pernice Brothers (le premier en cinq ans, le deuxième en quatorze). Car c'est à ce moment là que le disque prend son envol, après quatre premiers morceaux d'indie-pop assez anecdotique (quoique sympathique).

Ici, l'ambiance se fait plus cotonneuse, plus soulful. La voix de Joe Pernice a un phrasé et un grain qui font penser à un chanteur soul des seventies. Quant au reste, on jurerait que Burt Bacharach s'est occupé personnellement de la production de l'ensemble. Le résultat est tout à fait merveilleux, avec son tempo lent, la beauté de ses arrangements et un chant comme fait pour bercer.

Chanson merveilleuse, December In Her Eyes est donc le véritable point de départ de ce 'Who Will You Believe'. A partir de là, l'album se fait beaucoup plus inspiré, aligne quelques très bons moments (Hey Guitar, le beau duo I Don't Need That Anymore avec Neko Case, How Will We Sleep entre autres) ; et si rien n'arrive à la cheville de ce magnifique December In Her Eyes, si les Pernice Brothers mettent leur côté Burt Bacharach au rancart (même si The Purple Rain s'en rapproche), ces morceaux là rendent le disque tout à fait recommandable.

Album : Who Will You Believe
Année : 2024
Label : New West Records / Ashmont Records

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En plus des playlists Spotify, Deezer et YouTube, December In Her Eyes de Pernice Brothers est également en écoute ci-dessous :

Autre chanson remarquable de 'Who Will You Believe' des Pernice Brothers, voilà I Don't Need That Anymore, avec la participation de Neko Case :